Le lieutenant-colonel Lukkari inspecte la frontière. La Russie se trouve à moins de dix mètres juste derrière ces arbres, explique-t-il. Mais depuis cet été, la petite barrière qui séparait les deux pays a été démontée. À la place, une grille de trois mètres de haut surmontée de barbelés s’est dressée. Elle serpente dans la foret sur trois kilomètres de long : « Tous les 50 mètres, nous avons des caméras et des détecteurs de mouvements. C’est un système de détection qui nous alerte en cas de présence humaine. Si on repère quelqu’un qui essaie de la franchir, on est ainsi prévenu et on peut envoyer des patrouilles dans la zone. »
Bien plus qu’une invasion des chars russes, les gardes frontières redoutent une instrumentalisation par Moscou de la question migratoire, comme ce fut le cas en 2015, avec l’arrivée de plusieurs centaines de réfugiés : « Aujourd’hui, c’est très calme à la frontière. On enregistre entre dix à vingt passages illégaux par an. Mais cette clôture est faite pour faire face à une vague d’immigration à plus grande échelle. C’est arrivé à l’hiver 2015 en Laponie. On s’est retrouvé avec des demandeurs d’asile sur le même poste frontières. On s’est retrouvé avec quelques milliers de personnes d’un seul coup. »
Des demandeurs d’asile délibérément envoyés par la Russie ?
« C’est très difficile de l’affirmer, répond le lieutenant-colonel Lukkari. Mais bon, ils sont tous arrivés en même temps au même point de passage. C’est pour ça qu’on construit cette clôture. S’il n’y avait aucun risque, on n’aurait pas fait ce mur. Mais qu’est-ce qui peut se passer dans les prochaines semaines ? Dans les prochains mois ? »
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À une dizaine de kilomètres de la frontière, la petite ville paisible d’Imatra, peuplée de 30 000 habitants, apprend à vivre sans son voisin russe. Mais demander aux habitants ce qu’un mur va changer, c’est entendre en réponse des rires amusés : « Honnêtement, je n’en sais rien, rétorque Lauré, 32 ans. Il n’y a jamais eu de mur ici. Je ne vois pas vraiment ce que ça va changer. Maintenant, on est dans l’Otan donc pour moi tout ça, c’est politique. Ce n’est pas la population qui a décidé. »
Souvenirs de guerre
En Finlande, l’invasion russe de l’Ukraine a ravivé les souvenirs d’un passé douloureux. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le pays, défait par la Russie, est amputé de 10% de son territoire. C’est à cette époque que la famille de Matti Avohnenn a été privée d’une partie de ses terres, aujourd’hui situées côté russe.
Cet agriculteur de 63 ans vit dans des champs au milieu des forets de pins. Il aimerait voir la clôture arriver jusqu’à chez lui. Depuis la guerre en Ukraine, l’activité s’est renforcée à la frontière : « Ici, c’est un lieu de passage illégal de la frontière. J’ai vu des Roumains et des Afghans débarquer chez moi. En mars 2022, juste après le début de la guerre en Ukraine, un jeune Russe qui fuyait l’armée, est arrivé de Saint-Pétersbourg. C’est mon voisin qui l’a accueilli en plein hiver. Ça a pris une heure et demie aux garde frontières pour arriver jusqu’ici. C’est pour ça que cette clôture est une bonne chose. Si un jour, beaucoup de personnes arrivent d’un coup, alors cette clôture laissera le temps aux garde frontières d’arriver. »
La Carélie du Sud a été choisie pour expérimenter les premiers kilomètres de clôtures et un bilan doit être dressé à la fin de l’été. D’ici 3 à 4 ans, ce sont au total 200 kilomètres de grillage et de barbelé qui doivent être érigés tout le long de la frontière avec la Russie.
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