
Ankara s’oppose à l’intégration de la Suède dans l’Otan, lui reprochant d’héberger des militants kurdes qu’elle considère comme des terroristes. L’autodafé d’un exemplaire du Coran le week-end dernier, lors d’un rassemblement d’extrême droite devant l’ambassade de Turquie à Stockholm, a donné l’occasion au président Erdogan de fermer encore un peu plus la porte.
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Avec notre correspondante à Stockholm, Carlotta Morteo
Chez Linda, les tensions diplomatiques ne font que rajouter de la morosité à la grisaille ambiante de l’hiver suédois. « Celui qui a fait ça est un idiot qui ne représente que lui-même. La majorité des Suédois sont des gens bien, c’est vraiment dommage de haïr tout un pays à cause de ce qu’a fait un individu », juge-t-elle. D’ailleurs, cette vendeuse aurait préféré que son pays reste neutre, comme c’était le cas depuis deux cents ans, plutôt que d’aller s’aventurer à rejoindre l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan).
Extraditions
Ankara bloque depuis mai l’entrée de la Suède – et de la Finlande – dans l’Alliance. Pour lever son veto, elle exigeait l’extradition de membres du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et d’organisations alliées à celui-ci, qu’elle accuse de terrorisme. La Suède et la Finlande ont fait des concessions et signé un mémorandum.
Mais depuis début janvier, les relations entre les deux pays se sont dégradées, avec notamment la diffusion par des militants pro-kurdes d’une vidéo montrant un mannequin de Recep Tayyip Erdogan pendu par les pieds devant l’Hôtel de Ville de Stockholm. Ce week-end, un nouvel épisode est venu achever d’envenimer la situation. Dans le cadre d’une manifestation autorisée par la police à proximité de l’ambassade de Turquie, samedi, l’extrémiste de droite suédo-danois Rasmus Paludan a brûlé un exemplaire du Coran.
Reporté sine die
La réaction de la Turquie n’a pas tardé : « La Suède ne doit pas s’attendre à un soutien de notre part pour l’Otan », a déclaré dans la foulée le président Erdogan. Mardi, elle a reporté sine die une rencontre tripartite initialement prévue début février et destinée à lever les objections d’Ankara à leur candidature.
Johan, salarié de la tech, est très attaché à la liberté d’expression, mais le blasphème, c’est irrespectueux et il comprend la colère. Toutefois : « Un accord a été passé entre la Suède, la Finlande et la Turquie, et on devrait se concentrer là-dessus, estime-t-il. Si les pays respectent leurs engagements, ça devrait suffire ! Là, ce qu’il se passe, ça n’a rien à voir avec l’accord. Je trouve que c’est injuste. »
Situation « grave »
« Je veux renouer un dialogue de travail avec la Turquie », a affirmé le Premier ministre suédois Ulf Kristersson lors d’une conférence de presse mardi, critiquant les « provocateurs » qui tentent de déstabiliser la candidature suédoise et appelant au « calme » face à une situation « grave ».
Beaucoup pensent que la Suède a déjà fait trop de concessions. Le gouvernement est même jugé piètre négociateur par ce retraité de l’industrie. « Peu importe ce que font les Suédois, M. Erdogan dit toujours “non”, même quand on lui donne davantage, affirme-t-il. N’importe quel prétexte, il l’utilise en sa faveur. Donc, l’autodafé du Coran, ça a fait ses affaires. Seuls les Américains peuvent faire pression. »
Les Suédois n’envisagent plus l’adhésion à l’Otan avant les élections turques du mois de mai 2023.
(Avec AFP)
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